APRES L’EUPHORIE, LES ANALYSES

Il était environ 16H 50 aux Comores quand soudain, un peuple éclata de joie. Les Coelacanthes venaient de réussir l’exploit de tenir face aux Blacks stars du Ghana. Après un match à dynamique égale, tous les Comoriens s’extasient.  A présent, l’heure est aux analyses. Il ne s’agit pas ici de décrire ou d’analyser le football joué par les uns et les autres ce qui échappe de loin à nos compétences ; il s’agit au contraire d’étudier la portée de ce match, sa signification, son symbole et les conséquences plus ou moins directes engendrées par cette efficacité comorienne.

Une unité nationale retrouvée

Le temps d’un match, le Comorien est d’abord Comorien avant d’être Grand Comorien, Anjouanais ou Mohélien. En dehors des matchs disputés par l’équipe nationale comorienne, aucune occasion n’a réussi par le passé, à rassembler les Comoriens autour d’un idéal commun. Même le référendum de 1974 n’a pas été aussi rassembleur. 

Une espèce de fierté d’appartenance à la nation comorienne s’est constatée après ce match Comores-Ghana. Cela présage tout ce qui a de bons augures. Une vrai réconciliation, sans aucune discrimination insulaire est peut être possible entre les Comoriens.

Parce que les Comoriens ont montré qu’ils sont capables d’aller au-delà de leurs différences pour défendre la nation commune, les autorités devraient peut être s’appuyer sur le football, ce sport qui unit, pour promouvoir la solidarité parmi les Comoriens.

Les raisons d’un grand engouement

Les choses n’ont pas toujours été aisées. Il fut un moment, des supporters réclamaient la démission  du coach national, Amir, ce héros.  Il déclara dans une interview, vouloir maintenir la cohésion du groupe et faire de l’esprit d’équipe un véritable atout.

C’est peut-être cela, la force des Coelacanthes. Ces jeunes ont un plaisir intense à jouer ensemble. Et ils sont d’un tel engouement qu’ils jouent toujours avec corps et cœur. Les Comores bien dans l’âme, les couleurs de nos drapeaux flottent sur les plus hauts des sommets. Cet esprit patriotique manifesté par les joueurs de l’équipe nationale est ressentie par tous.  Evidemment, cela ne laisse personne

insensible. Et alors qu’on assiste à une renaissance de l’amour de la patrie, le peuple ordinaire ne pouvait se distinguer de leurs compatriotes qui les font honneur.

Quelque part, ce qui suscite l’attachement du peuple à cette sélection prometteuse, ce sont les résultats et le visage qu’elle montre déjà, en si peu de temps d’existence. On garde des Comores, l’image d’une jeune équipe matériellement sous équipée mais mature et mentalement surarmée. En soutenant sans condition et avec ferveur les Coelacanthes, les Comoriens montrent qu’ils savent reconnaître les exploits à leur juste mérite.

Des messages envoyés

L’unité nationale retrouvée aujourd’hui est une pierre dans les yeux des séparatistes comoriens. Le sport a raison de la politique. Et si les matchs de l’équipe nationale comorienne se multiplient, la politique perdera en influence.  Et bien que le quotidien noir comorien ne tardera pas à retrouver son cours, en une journée, beaucoup de messages ont été envoyés.

Aux politiques qui estiment que leur impopularité est inhérente à leurs fonctions ; qu’ils se détrompent ! Le jour où ils manifesteront leur patriotisme comme le font les joueurs des Coelacanthes, le peuple sera derrière eux. Des présidents comoriens, Ali Soilihi était, de son vivant, l’un des plus impopulaires. Pourtant, aujourd’hui, trois décennies après sa mort, la mémoire et la conscience collectives le réhabilitent. Preuve que les Comoriens reconnaîtront toujours la prouesse des uns et des autres quel que soit le temps passé.

De son côté, la société Mamwe a elle aussi envoyé un signal fort ; un message à deux visages. D’une part, elle a voulu participer à cet élan national en fournissant l’électricité nécessaire au stade de Mitsamiouli pour la transmission de ce match.

Mais à cette surprenante solidarité de Mamwe, se cache une réalité sinistre. Mamwe est capable d’alimenter presque régulièrement Mitsamiouli et certaines régions. Comme par hasard, aujourd’hui l’électricité a pu être fournie sans encombre. Pourtant, la consommation énergétique des Comoriens, en ce jour de match, a dépassé l’usage de tous les jours. Pourquoi l’électricité manque les autres jours ?  Et si tout le monde participait tous les jours à l’effort national ?

Même l’ORTC …

Aujourd’hui, tout le monde a participé à ce qui est véritablement une fête nationale. Même la télévision nationale comorienne qui pourtant, brillait jusque-là par son silence, est sortie de ses cachots pour diffuser la rencontre Comores-Ghana. Un peu comme si elle voulait elle aussi, déclarer son amour à la patrie comorienne et à la sélection nationale de football. On aura tout vu. Pourvu que ça dure…

Thierry Roland finirait cet article en disant : Après avoir vécu une telle leçon de solidarité nationale, on peut mourir heureux. C’est dire si l’enthousiasme provoqué par la belle prestation des Coelacanthes est sans exemple.  Une chose est sûre. Les Coelacanthes sont en train d’écrire leur propre histoire; une histoire qu’ils écrivent en réécrivant au passage celle de toute l’identité nationale comorienne.

Omar MIRALI

COMORESplus

 

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