LA JUSTICE ! OUI MAIS POUR LES AUTRES

Par IDJABOU Bakari

A peine trois arrestations et la toile s’enflamme déjà, certains s’activent et le gel des dossiers devient une possibilité. Dans un pays où la corruption est la norme et la probité l’exception, « l’équilibre de la terreur » fait merveille et la justice peut être encore sacrifiée à l’autel du « msitirilano ». Pourtant, tout ce beau monde appelle à un Etat de droit. Mais qui en veut vraiment ?

Léger frémissement dans le marécage nauséabond des affaires juridico-politiques en déshérence. Trois personnes appartenant à des sociétés publiques, deux de Comores Télécom et une autre de la SNPSF ont été arrêtées. Un dossier qui prenait de la poussière, comme des centaines d’autres, et remonterait en 2011.

Aussitôt, la toile s’enflamme. A ceux qui veulent croire aux prémices d’une volonté nouvelle d’appliquer la loi, s’oppose une lecture de la conjoncture politique. Laquelle, sans la nier, met en exergue une autre réalité non avouable : s’attaquer aux affaires, c’est courir le risque de discréditer toute la cohorte de l’establishment, la même qui se succède au pouvoir depuis l’indépendance.

Et comme la corruption est devenue un sport national, le plus populaire et le plus pratiqué assidument et ouvertement à tous les niveaux, « l’équilibre de la terreur » tient lieu d’assurance contre toute éventuelle poursuite judiciaire. Le principe étant que chacun connaissant les méfaits de l’autre, le silence est devenu le summum des vertus.

Pour autant, ces arrestations inquiètent. Ce qui n’était jusqu’alors que concept, la justice commence à sortir d’un sommeil profond. Le judiciaire pourrait redevenir ce troisième pouvoir tant espéré. Rien que cette perspective, certains en tremblent déjà. Parce qu’ils réalisent que si jamais « le tsunami » judiciaire s’abattait sur les îles, le nettoyage serait d’une ampleur inimaginable. La vague n’emporterait pas que les gros bonnets.

Or, la justice, tout le monde la veut bien. Le peuple comme les dirigeants la réclament haut et fort. Des héritiers de Mbaé Trambwé sur les places publiques, aux virtuoses du virtuel, en passant par les prestidigitateurs de la politique, elle fait l’unanimité.

A ceci près, qu’elle doit s’appliquer seulement aux autres. Sauf que compte tenu de la consanguinité intrinsèque à l’insularité et des relations interpersonnelles, l’autre n’est pas tout à fait un inconnu. Et ça change tout.

Dès lors, l’hymne à la justice est suspect. Après les constats d’Iki, les menaces de Boléro, que feront Azali et Fahmi ?  

IDJABOU Bakari

COMORESplus

 

 

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