iz9yibst[1]Le 13 mai 1978, vers 5h du matin, le dictateur Mongozi Fundi Ali Soilihi Mtsachiwa est renversé par un coup d’état. Vingt et un mercenaires, qu’il a lui-même recrutés deux ans et demi plus tôt pour consolider son régime, acquis par la force le 3 aout 1975, l’ont rendu sa monnaie. Bizarrement, alors que tout homme épris de bon sens devait se méfier de Bob Denard, pour ses retournements de situation, son successeur Ahmed Abdallah Abdérémane, le gardera 12 ans, à la tête de l’armée comorienne, avant de se retourner, encore une fois, contre son protégé. L’épopée de Denard aux Comores, commence un 6 septembre 1975. Ce mercenaire, est recruté au Gabon, et envoyé en renfort pour consolider un coup d’état mal au point, fomenté le 3 août 1975, par Ali Soilihi, et qui avait tout le mal du monde à s’imposer, et sur le plan intérieur comme sur sa reconnaissance internationale.

Sur le front intérieur, les putschistes ont dû faire face à la résistance dans le Mbadjini d’Omar Tamou, au Hamahamet de Mohamed Taki pour la Grande Comore, puis à la totalité de l’île d’Anjouan d’Ahmed Abdallah Abdérémane. Au départ, son protégé, la France, comptait sur la gendarmerie et la menace de la légion étrangère, pour venir à bout des résistants. Mais malgré les armes, la mobilisation de tous les anciens retraités, la résistance persistait et menaçait le nouveau régime surtout que tous les pays africains refusaient de le reconnaitre. Face à cette résistance farouche, la France a d’abord fait appel à des anciens militaires comoriens aguerris dans les forces malgaches comme Adinane, Ali Gaya et Singa Singa, auxquels il a ajouté les anciens gardes-Comores. C’est une force embryonnaire, qui a fait la première incursion terrestre à Mbeni le 2 septembre 1975, pendant que l’armée française, s’occupait de la logistique, de la maitrise l’air avec deux avions engagés, et de la mer avec un bateau de la marine française. Le bilan sera 5 morts à Mbeni et une cinquantaine de blessés. Mais c’est le 8 septembre 1975, que Bob Denard et ses hommes, parviendront à pacifier le Hamahamet avant de s’attaquer à l’île d’Anjouan.

Le 21 septembre 1975, un contingent formé de près de 150 hommes, dont 21 mercenaires blancs, vont débarquer sur l’île d’Anjouan. Il leur faudra trois jours et 4 morts dont un coté gouvernemental Madi Moissi, pour parvenir à pacifier l’île. Le président Ahmed Abdallah est arrêté et conduit à Moroni, puis placé sous haute garde, dans sa villa de Djoumdjou à Mavingouni. Beaucoup plus tard, le 18 mars 1978, Iconi sera attaquée à son tour, et paiera la plus grande tribu avec 12 morts et plusieurs dizaines de blessés. Il est à noter que pour cette dernière opération, seuls des mercenaires noirs comme Osman, des militaires Tanzaniens, venus formés l’armée comorienne, et les militaires comoriens ont pris part aux massacres. Voici pour le décor de cette journée.

Ce qui m’intrigue avec cette date, ce n’est pas sa nature : jour sombre pour les uns, jour de libération pour les autres, mais cette date 27 mai 1978, où les archives de l’OIF, mentionnent que la délégation comorienne, lors du sommet de la Francophonie, était conduite par Salim Himidi, pourtant à cette date, il était en prison. Les Comores d’ailleurs, n’ont pas pris part, car à cette date, il n’y avait pas de gouvernement. Comment donc expliquer cet impair ? Au mois de mars 1978, le Président Valery Giscard d’Estaing, a envoyé un de ses conseillers pour l’Afrique, pour négocier une solution équitable avec les Comores sur Mayotte. Il était convenu d’un commun accord, que la France allait se reconnaitre la souveraineté comorienne sur l’île, en échange, Ali Soilihi  devait abandonner le pouvoir au mois de juin 1978. D’autres détails, sur la présence d’une base militaire française à Mayotte, sur le maintien du franc CFA etc.… faisaient partie de l’accord secret.

Pour parachever le tout, Ali Soilihi, rappelle Salim Himidi, tombé en disgrâce avec le régime, en raison de son opposition à l’instauration d’un système de purge, sur le modèle de la révolution culturelle, en Chine, dont le commando Moissi, était le bras de répression. Pour se démarquer, Salim Himidi avait dès sa nomination au ministère de l’intérieur et de la décentralisation, désarmé toutes ses forces : police et gendarmerie. Il leur a donné le nom de « DJAYISHI LA AMANI NAWU SALAMA » par opposition au « DJAYISHI LA MAPINDUZI ». Mais le point d’achoppement des deux hommes, furent surtout le rôle des comités villageois et national, dans le processus de la Révolution. En rappelant, son adversaire, retiré chez lui à Mbeni, pour lui confier en secret cette mission de représenter le chef de l’état au sommet de la Francophonie, alors qu’Ali Soilihi avait un gouvernement et notamment un ministre des Affaires Etrangères, n’est pas habituel, dans une administration. Ma curiosité, est allée jusqu’à découvrir, une vérité qui nous est longtemps cachée.

En effet, après le passage du conseiller de Valery Giscard d’Estaing, Ali Soilihi, a réuni son cabinet et leur a exposé l’idée de son départ. Le débat au sein du cabinet a commencé, certains soutenaient la candidature de Mouzaoir Abdallah et les autres pour Ali Hassanali, tandis qu’Ali Soilihi avait fait le choix sans le dire de Salim Himidi. D’où cette désignation pour le sommet, afin de finaliser, au cours des travaux de la Francophonie, l’accord ainsi que sa publication. C’est alors, qu’Ali Soilihi allait faire la déclaration. La question reste entière. Pourquoi la France a-t-elle négociée un départ d’Ali Soilihi, en même temps lui organisé un coup d’état ? Ce changement d’attitude serait-il lié par le choix porté par Ali Soilihi, en la personne de Salim Himidi ou bien était-ce un faux accord pour que le gouvernement comorien baisse sa garde ?

En tout cas, parallèlement à ces négociations, un événement mondial a bouleversé le monde diplomatique. Le ministre français des Affaires étrangères, M. Louis DE GUIRINGO, ancien Ambassadeur de France à l’ONU, au moment de l’admission des Comores, a été empêché par la population tanzanienne, a effectué une visite officielle dans ce pays. La population a envahi le tarmac de l’aéroport de Dar-e-Salam, empêchant le ministre de descendre de l’avion, scandant « libérez les Comores, libérez Mayotte ». La manifestion était retransmise en direct par la radio tanzanienne. Ce ministre français s’est illustré à l’époque par cette phrase : « l’Afrique est le seul continent où la France peut changer le cours de l’histoire avec cent hommes ». La France a-t-elle mis dans le compte de Salim Himidi, les déboires de sa diplomatie, en Afrique de l’Est ? En tout cas, il aura mis en application ce dont il avait prédit, puisque 21 personnes ont suffit pour renverser le régime Ali Soilihi.

MOHAMED CHANFIOU Mohamed

COMORESplus

Retour à l'accueil