Comme la majorité des comoriens, les parlementaires expriment un besoin d’informations sur la gestion de la citoyenneté économique. Ce qui est tout à fait compréhensible, puisque l’activité informative rentre dans leur mission de contrôle du gouvernement.

Mépris

C’est ainsi que lors de la précédente séance de questions au gouvernement, un jeune parlementaire interroge légitimement et avec courtoisie  le ministre des finances, M. Mohamed Ali Soilih, sur le nombre de citoyennetés octroyés, les bénéficiaires, les fonds générés et la part de ceux-ci dans les salaires des fonctionnaires de l’Etat. Il exprime surtout son souhait de voir ces recettes passer par le trésor public et donc faire l’objet de prévisions budgétaires annuelles.

Avec un air moqueur, sourire au coin et non sans un brin de dédain, l’argentier de l’Etat balaie d’un revers de la main la question du parlementaire. Il fallait que ce député revienne à la charge pour que le ministre des finances lui fasse un cours sur le fonctionnement des institutions financières internationales (et quel cours !) avant de lui dire tout de go que la mission des parlementaires s’est arrêté à la confection de la loi sur la citoyenneté et qu’ils n’ont rien à faire avec l’exécution de celle-ci. Et au ministre d’expliquer à son auditoire que tout est transparent dans ce dossier, puisqu’ Interpol, le FMI et la Banque Mondiale, ainsi que la France sont tenus informés de toute sa gestion. Mais pour respecter une clause de confidentialité d’avec les partenaires, les fonds générés par la vente de la citoyenneté économique ne peuvent pas faire l’objet de budgétisation. Ce qui voudrait dire que le monde entier peut savoir tout sur ce dossier sauf les concernés, donc le peuple comorien et ses représentants.

Puis il enchaina, sans sourciller, que la loi sur la citoyenneté comporte deux volets. Un volet individuel qui peut faire l’objet d’un contrôle parlementaire, et un volet institutionnel qui ne relève que de la compétence exclusive du gouvernement. C’est ainsi que l’accord conclu entre d’Abou-Dabi et Moroni, dont personne n’avait jamais entendu parler auparavant, sur la citoyenneté économique ne peut faire l’objet d’un quelconque contrôle du parlement.

Loi sur la citoyenneté économique

Pourtant, il n y a aucun article des 15 que comporte la loi relative à la citoyenneté économique en Union des Comores qui confirme ce que le ministre des finances a osé dire à ceux qui ont fait cette loi. Au contraire, cette loi associe le parlement à chaque étape important de la procédure sur l’octroi de la citoyenneté économique.

D’abord, la somme que doit investir le prétendant à la citoyenneté économique, est fixée par la loi des finances de l’année budgétaire où le candidat présente sa demande (cf. Article 1 de la loi). Ensuite, la commission nationale indépendante, l’organe chargée d’instruire les demandes de la citoyenneté économique doit comprendre en son sein, deux parlementaires parmi ses 7 membres (cf. Article 3 de la loi) Et en fin, et c’est sur cet aspect que le ministre s’est bien foutu de nos parlementaires, tout accord conclu entre l’Union des Comores avec des Etats ou institutions publiques ou privées pour la promotion et la mise en œuvre des programmes d’investissements économiques est soumis à l’approbation ou à la ratification de l’Assemblée de l’Union(cf. Article 12 de la loi).

Est-ce que l’accord conclu entre Moroni et Abou-Dabi, cité par le ministre des fiances, a fait l’objet d’approbation du parlement ? Pas sûr…Sinon les parlementaires n’iraient pas interroger le ministre sur ce sujet. Est-ce que le gouvernement a conclu d’autres accords avec d’autres pays du golf persique ? Personne ne sait.

Budgétisation des fonds de la citoyenneté économique

On l’a dit dans ces colonnes que les comoriens demandent une transparence dans la gestion économique. Et puisque des clauses de confidentialité empêcheraient qu’on les informe sur le nombre de leurs concitoyens économiques, qu’on leur dise au moins combien la vente de notre citoyenneté génère comme fonds et comment ces fonds sont utilisés. Et pour ce faire, il faut  intégrer ces recettes dans la loi de finance annuelle. Mais Mohamed Ali Soilih explique que le fait que le montant de ces fonds n’est pas préalablement connu empêche son introduction dans les prévisions budgétaires. Comme si nos parlementaires ne savaient pas que le propre du budget ce sont les prévisions. Comme si ceux-ci ne connaissaient pas l’objet des lois de finances rectificatives et la loi de règlement.

La réalité le ministre des fiances et de l’économie de l’union s’est bien foutu de nos parlementaires lors de cette séance parlementaire.

 

Laila Said Omar

COMORESplus

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