Législatives de 2014 : halte aux velléités !
26 juil. 2013Dans un article paru la semaine dernière dans le journal La Gazette, on apprend que des élus de l’Assemblée nationale seraient à la manœuvre pour tenter de persuader Beit-Salam de la nécessité de reporter à deux ans les élections législatives. En fait, ils aimeraient les repousser en décembre 2016 au lieu de décembre 2014, fin de la législature en cours. Les parlementaires avancent deux arguments majeurs et convaincants à leurs yeux : d’une part, la nécessité d’harmoniser toutes les élections aux Comores, et d’autre part, la difficulté pour l’Etat d’obtenir le financement de ces élections législatives. L’idée serait également reprise par certains mouvements ou partis de la mouvance présidentielle pris par la fureur de voir leur échapper quelques sièges du palais de Hamramba.
L’harmonisation ne doit pas être une fin en soi
Et bien, à tous les porteurs de cette velléité je dis halte ! Il ne serait pas judicieux d’engager le chef de l’Etat et tout le pays dans une pente aussi glissante. Car une telle réforme, non seulement n’apporterait rien à notre système institutionnel, mais surtout elle générerait une vague de positions antithétiques à un moment où le pays a plus besoin de cohésion. L’harmonisation ne doit pas être une fin en soi ni un objectif politicien. Pourquoi vouloir ramener les élections législatives au même jour que les présidentielles dans un régime qui est tout sauf parlementaire ? Il me semble que ces élections intermédiaires présentent un intérêt majeur, à la fois politique et démocratique dans un système comme le nôtre, qui se présidentialise au fil des années au grand dam des dispositions constitutionnelles. Maintenir des élections législatives trois ans après les présidentielles, garantit un certain équilibre politique et exige du président de la République une vigilance absolue pour préserver les siens d’un revers électoral qui serait interprété, à juste titre, comme un désaveu vis-à-vis de son action. Enfin pourquoi voudrait-on enlever des élections législatives toute sa grandeur, et par conséquent faire de l’Assemblée nationale l’appendice direct du pouvoir exécutif.
Ceux qui prétendent être les thuriféraires de la démocratie aux Comores ont le devoir de défendre le maintien de ces élections intermédiaires suivant le calendrier constitutionnel. Et ils devraient aussi œuvrer pour que les municipales y soient accouplées. Les Comores ne doivent pas être le seul pays au monde où, sous prétexte d’harmonisation ou de difficultés financières, toutes les élections doivent avoir lieu le même jour. Ce serait un raccourci absurde de croire que l’harmonisation de toutes les institutions améliorerait d’un iota les affaires du pays. Au contraire, elle emprisonnerait la démocratie en donnant un chèque en blanc pour une période de cinq ans à des présidents dont le mandat est pratiquement non renouvelable, selon la règle de la tournante.
Les Comores n’ont pas un seul partenaire
Pour ce qui est de la question du financement des élections. Que je sache, les Comores n’ont pas un seul partenaire pour les opérations électorales. Ce n’est donc pas un drame si l’un de nos partenaires ne souhaite pas financer ces élections ou n’est pas en mesure de le faire. Le pays a le devoir de prévoir assez rapidement un autofinancement-au budget de 2014- et solliciter l’implication d’autres partenaires. Je ne crois pas que l’Union européenne ou la Coopération française abandonneraient les Comores dans ce processus de consolidation institutionnelle. En tout état de cause, le chef de l’Etat doit trancher rapidement sur le sujet et éviter qu’un débat stérile et qui peut, plus tard, se révéler nocif s’installe. Faisons confiance à sa lucidité et à sa capacité à éluder l’engeance parfois cynique qui espère le pousser la faute au détriment de l’intérêt supérieur de la nation.
ALI MMADI