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D'aucuns affirement que les prisons, comme la justice d'un pays constituent des critères fiables et sérieux d'évaluation de son niveau de développement. Si tel est le cas, on comprend mieux le rang qu'occupent les Comores, dans les bas fonds du classement mondial. Une petite visite à Daouedjou, le très select "Le Moroni2", la prison suffit de mesurer l'ampleur de la catastrophe, de l'abandon et de la démission de l'Etat. 600 détenus agglutinés les uns sur les autres, dans une prison vetuste, délabrée et insalubre donnent la mesure du désatsre. La dignité humaine est foulée au pied, bafouée. Dormir à ras le sol, sans lit encore moins de matelas, sur du ciment. Et encore si il en reste un peu. Promiscuité et hygiène douteuse en compagnon inséparable. Pour cause? Une douche par semaine. Pour les besoins naturels, il faut être un surhomme ou avoir une maîtrise extraordinaire de son corps: un passage aux toilettes par jour et à heure fixe. Côté alimentation, il revient aux familles des prisonniers de subvenir à leur besoins. C'est le royaume de la débrouille et de la solidarité presqu'obligatoires. Déjà que le citoyen libre a du mal à se nourrire au quotidien, s'occuper d'un prisonnier devient une charge supplémentaire très lourde. Et la distance pour les familles éloignées de la capitale un parcour de combattant. "Le parloir" achève le folklore. La confidentialité est une notion inconnue. Un simple grillage sépare les interlocuteurs alignés côte à côte à deux pas des surveillants.

Pour finir ce patchwork infâme, des surveillants sans formation aucune, livrés à eux-même et investis des pleins pouvoirs essaient de faire fonctionner la boutique. Dans un pays où la corruption règne, les passes-droits une tradition ancestrale et le respect des lois un luxe, les abus de pouvoir, les compromissions, la complicité et l'arbitraire sont monnaies courantes. Si le prisonnier de droit commun souffre de ces affres et humiliations, on imagine aisément le triste sort réservé aux prisonniers "politiques" encore une fois. D'ailleurs, deux d'entre eux accusent le coup jusqu'à être hospitalisé chez les militaires pour gonflement inexpliqué du corps pour l'un alors qu'un autre aurait besoin de soins ophtalmologiques. Cette situation révoltante est de trop. Du moins c'est la réaction unanime des hommes et des femmes , à l'initiative de la création du comité de soutien des accusés de la dernière tentative de coup d'Etat aux Comores. Ils estiment à juste titre que les conditions carcérales constituent indéniablement une atteinte à la dignité humaine. Dans n'importe quel pays qui se revendique Etat de droit, la prison n'est qu'un lieu réservé aux personnes dangereuses pour la société, juste le temps que ces personnes-là paient leur dette. Or, Daouedjou ressemble plus à un "trou à rats" qu' à une prison. Une forteresse en ruine où seul le croissant rouge est autorisé à y entrer et un organisme comme ASF (Avocats Sans Frontière) interdit de cité. Qu'on ne s'y trompe pas. La démarche est citoyenne. Le combat  se résume au respect de la dignité humaine. Et le souhait se réduit à l'attente d'un procès équitable dans les plus brefs délais.

Car, pour ces prisonniers d'un autre genre, aux supplices des privations s'ajoute l'incertitude d'une enquête confuse qui pâtine et fleure bon les grandes manoeuvres. Mahmoud Ahmed Abdallah, Capitaine Amdjad, Toyb Marouf, Ibrahim Ali Ibouroi, Houssein Maoulid et d'autres compagnons d'infortune croupissent en prison sous mandat de dépôt. Ils sont inculpés pour "tentative de destabilisation, complicité, non dénonciation, atteinte aux institutions et détention illégale d'armes de guerre". Un acte grave. Il rappelle des souvenirs douloureux aux comoriens qui commencent à peine à se remettre  de ces interminables années d'instabilité permanente. Seulement, force est de constater, selon maître Baco, que les enquêteurs sont jusqu'alors incapables de produire des éléments de preuve, qu'ils auraient déclaré détenir, corroborant la théorie du soit disant complot. En tout et pour tout, comme arme de guerre saisie, il ne disposerait que d'un simple fusil de chasse dans son étui. De plus, le commissaire au gouvernement refuse de présenter ses maigres preuves à la défense, arguant les détenir à son domicile. Ce qui est pour le moins iconoclaste et singulier pour un dossier d'une telle envergure même en république bananière.

Par ailleurs, l'avocat souligne le mode opératoire des arrestations. Tous les inculpés seraient arrêtés à leur domicile. Le lien entre ces hommes serait établi que suite à des aveux obtenus après interrogatoires dans un camps militaire. De là à émettre des doutes sur la sincérité et la véracité de ces confessions, il n' y a qu'un pas que franchit sans hésitation la défense. Pour toutes ces raisons, serein et confiant, le comité de soutien compte mettre à profit la volonté manifestée dernièrement par Iki de voir une justice enfin efficiente pour mobiliser l'opinion et reclamer ni plus ni moins qu'un procès dans les règles de l'art. Force est de constater que depuis la mise en mouvement de cette procédure aucune charge nouvelle n'est avérée du fait de l'absence de communication des enquêteurs. Pourtant, ils sont tenus de tenir la défense au courant de toute évolution. La thèse tant soutenue par les avocats relative à l'innocencede leurs clients semble la seule et unique à faire état.

Du coup, le Comité s'interroge. N'est-ce pas un coup d'Etat monté de toute pièce?

Une vraie fumesterie du magicien d'oz ?

Idjabou Bakari

COMORESplus

 

 

 

 

 

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