Manifeste pour une ouverture du débat sur la Constitution actuelle

Manifeste pour une ouverture du débat sur la Constitution actuelle

A l’origine, une Constitution, c’est-à-dire le texte fondamental qui régit de manière organisée et hiérarchisée l’ensemble des rapports entre gouvernants et gouvernés au sein d’un État, se veut durable et doit résister au temps. Pourtant, on constate bien vite qu’une constitution ne peut pas, dès le départ, tout déterminer et qu’il est nécessaire de lui apporter des retouches, de faire des aménagements et des ajouts dans le but d’adapter le texte aux évolutions de la société et des dépenses publiques. La Constitution actuelle date de 2001 et avait été créée dans un contexte de séparatisme anjouanais. Il s'agissait alors d’arrêter l’hémorragie au plus vite, essayer une Constitution faite pour satisfaire les dirigeants séparatistes et la junte au pouvoir et non le peuple et cela, au mépris du bon sens.

Aujourd'hui, la Constitution de 2001 est devenue l'une des Constitutions comoriennes la plus dangereuse, car elle a ôté aux Comoriens le droit d’avoir une nation une et indivisible.

C'est l'une des Constitutions comoriennes la plus séparatiste, car elle a institué, par ses articles et sa construction, le séparatisme d’Etat, privilégiant la citoyenneté des îles et non celle d’un pays.

C'est l'une des Constitutions comoriennes la plus violente, par ce qu'elle concentre tous les pouvoirs dans les mains d'un président élu, irresponsable devant tous les citoyens. Qui plus est, le mode de désignation, d'abord par l'île d'origine, a tué les partis politiques nationaux, le débat public et a renforcé le clientélisme insulaire et les prébendes.

C'est l'une des Constitutions comoriennes la plus scabreuse, par ce qu'elle a instauré une « monarchie de fait », un système opaque, des nominations centralisées autour d'un seul homme, un Président- Dieu sans contre signature des autres dirigeants.

C'est l'une des Constitutions comoriennes la plus budgétivore, par ce qu'elle a institué des institutions politiques à tous les étages, générant des dépenses publiques croissantes et sans fin, dans un contexte économique très contraint.

Trois présidents ont été, successivement, élus depuis 2001 : Azali par une élection tronquée, puis Sambi et enfin Iklilou. Les trois îles composant l’actuelle Union des Comores ont d’ores et déjà désigné leur représentant. Il ne reste que Mayotte dont l’élection parait probablement compromise, en raison de la difficulté d’organiser une primaire sur le sol mahorais.

Malgré la relative stabilité politique et le respect d’un calendrier électoral, le séparatisme n’a jamais reculé, les pouvoirs du président de l’Union sont illimités et le favoritisme, la corruption et l’impunité sont banalement sacralisés.

De 2001 à 2016, la tournante aura terminé son temps d'alternance. L'opportunité se présente plus que jamais pour un bilan sincère et critique, sur la Constitution de 2001.

Nous appelons à un débat public sur les institutions actuelles et nous sommes prêts à défendre nos positions face à tous les concurrents républicains.

Nous appelons à des assises nationales sur la Constitution actuelle, et nous ne devons pas rater cette opportunité politique.

Nous devons refuser de refaire les mêmes atrocités de 1975, celles qui ont consisté à personnaliser le débat et non à ouvrir un débat serein sur l'avenir institutionnel.

Nous proposons la mise en place d'un régime parlementaire et d'une présidence tournante purement honorifique.

Un régime parlementaire dont les fondements seront l'élection proportionnelle nationale à deux tours. Les listes ayant obtenu plus de 15% des votants seront admis au second tour et les listes ayant obtenues plus de 5% au moins dans deux îles pourront fusionner. Une prime majoritaire de 30% sera donnée à la liste ayant obtenue la majorité au premier tour, ou à défaut celle qui est arrivée en tête au second tour.

Le scrutin propositionnel et sur liste pour les élections nationales et régionales permettront de mettre fin aux partis opportunistes, insulaires et régionalistes. Il permettra également par le biais de la parité, qui serait constitutionnalisée, de favoriser l'émergence des femmes en politique et des jeunes élus.

Notre cri est un cri patriotique d'amour pour les Comores, c'est par ce que nous aimons les Comores, que nous portons dans nos cœurs et dans nos chaires les Comores que nous exigeons un débat sur les institutions actuelles avant de procéder à des élections qui engagent de nouveau implicitement la tournante.

Mme Zahara Abdallah Youssouf, Membre fondatrice du Réseau National Femme et Développement ;

M. Faissoili Abdou, journaliste indépendant ;

Mme Sittou Raghda Jaffar, ancien Ministre ;

M. Nakidine Mattoir, historien ;

Mme Zaitoune Mounir, ex-commissaire à l’éducation à l’île d’Anjouan ;

M. Said Yassine Said Ahmed, journaliste et écrivain ;

Mme Mariama Mlindé, professeur d’anglais ;

M. Abderemane Said Mohamed, anthropologue et écrivain ;

Mme Lili Said Mohamed Djohar, retraitée ;

M. Ibrahim Barwane, anthropologue ;

M. Dini Nassur, ancien Ministre.

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