L’AFFAIRE ANIAMI MCHANGAMA
21 août 2016Par Omar MIRALI
Persistantes, les rumeurs enflent au lendemain de la publication par La Voix des Comores, d'un article informant qu’Aniami Mchangama serait pressentie pour être nommée commissaire en charge de la diaspora. L'article précisait par ailleurs que cette nomination imminente interviendrait sous les demandes incessantes de Fahami Saïd Ibrahim, ministre comorien de la justice. A priori, on aurait tendance à voir en cet article une grosse supercherie. Sauf que certains détails ne laissent pas indifférent. Le seul simple fait d'évoquer la pression de Fahami Saïd Ibrahim, donne une certaine crédibilité à l'article. On sait que cela n'est pas impossible. La proximité entre le ministre et Aniami Mchangama, ancienne élue de la ville d'Argenteuil est connue de tous. L'article méritait donc un petit coup de projecteur. Et après quelques investigations, il en sort les hypothèses et les éléments contenus dans le présent texte.
L'état du dossier
Il est vrai, et cela est incontestable, que Fahami essaie d'appuyer la candidature d'Aniami Mchangama. Mais que peut-il concrètement en l'espèce ? Pas grand chose, pour ne pas dire rien du tout. Si cela ne tenait qu'à lui, Aniami aurait été déjà en exercice. Il faut dire que Fahami, ne partageant pas au départ les mêmes idées qu'Azali, les deux hommes incarnant chacun à sa manière, sa propre force politique, n'est pas particulièrement en odeur de sainteté dans ce gouvernement. Il n'en est là que par des jeux d'alliances électoralistes, s'étant rapproché d'Azali contre Mamadou, avec Sambi et la plupart des ténors du parti JUWA. Un jeu d'alliance qui a joué de son poids, Azali étant mal engagé dans les élections qui ont fini par le consacrer. Au fond, Azali, ne garde Fahami et le parti JUWA à ses côtés que par simple devoir moral. Tout cela pour dire que le dossier Aniami ne dépend absolument pas de Fahami. Un homme s'occupe de cette affaire. Il s'agit, non pas du président Azali, lui même, mais du ministre le plus opaque qui soit, celui des affaires étrangères, le très mystérieux Dossar. C'est bien lui le ministre de tutelle des commissaires de la diaspora, c'est donc lui, le probable futur chef d'Aniami Mchangama. Heureusement qu'on connaît l'indépendance et la persévérance de cette femme. On est moins inquiet. Une autre personne qui serait nommée sous la houlette de Dossar ne s'en sortirait pas indemne.
Dossar, l'homme qui enterre tous les dossiers.
Le dossier Aniami, selon toute vraisemblance, ne serait même pas encore parvenu au président. Fahami, fidèle à ses principes et ne voulant pas empiéter sur le terrain glissant des compétences de Dossar, l'imprévisible ministre, ne peut se permettre de faire mot du dossier Aniami au président. Un président qui, comme je l'ai sous entendu, ne serait pas particulièrement à l'agonie si son parti, CRC, venait à rompre toute sympathie avec JUWA. C'est à se demander d'ailleurs si Azali ne cherche pas à déstabiliser JUWA. On sait tous que Fahami voulait le ministère des affaires étrangères. Un poste qu'il a occupé par le passé avec, reconnaissons-le, davantage de zèle, de talent et de passion que beaucoup d'autres pensionnaires du Mirex. Il n'a eu que la justice, comme pour dire à Sambi, au final, c'est moi qui ai le dernier mot cher monsieur. On ne peut donc pas savoir ce qui se murmure dans l'entourage rapproché du président. Mais deux hypothèses sont possibles. Soit, le président est au courant des sollicitations de Fahami et de Aniami Mchangama et décide de les passer sous silence, soit c'est Dossar qui s'illustre encore une fois par ses capacités à rendre flou tout ce qui est transparent et limpide. Ce serait un petit jeu de cachotterie de plus comme il n'en a joué pas mal, lui l'homme clé de l'affaire dite de la citoyenneté économique. Il se murmure par ailleurs que des petits allers-retours tous azimuts interviennent ici ou là. Et si Dossar préférait plus la nomination de l'une des femmes de Moroni avec lesquelles il est en négociation à celle d'Aniami Mchangama ? Et si c'était cela qui empêche la nomination de celle-ci ? Cela n'est pas impossible. Tout devrait aller vite en tout cas. C'est une question de quelques jours voire d'un mois tout au pire. Et, Dossar l'ignore sûrement, cette affaire peut faire tache à Azali et à son ministre. Aniami Mchangama a une force redoutable dont peu de politiques comoriens disposent. Elle est soutenue quasiment par toute la diaspora comorienne de France. Qui, des hommes et femmes politiques comoriens, peut se permettre de se mettre la diaspora comorienne de France à dos?
Pourtant Aniami est une aubaine...
Les gouvernements comoriens se succèdent et se ressemblent. Le point commun à eux tous ? Ils ne valorisent aucun talent et misent prioritairement sur le recrutement de proches au mépris de tout recrutement de mérite. Voilà aujourd'hui, avec cette histoire probable de nomination d'Aniami Mchangama, une autre occasion pour le gouvernement Azali d'envoyer un signal fort au peuple comorien. On verra dans quel sens décidera-t-il d'orienter sa décision. Si toutefois, décision il y en a. Parce qu'il ne faut pas exclure l'hypothèse que cette histoire s'évapore avec le temps sans que personne n'en sache le terme.
Pourtant, Aniami Mchangama est une aubaine pour notre pays. Que n'a-t-elle pas fait pour les Comores ? Élue française à l'époque, elle interpella, parmi les premiers ressortissant comoriens à le faire, le gouvernement français lorsque l'imprudent Denis Brogniart réduisit toute l'histoire comorienne au malheureux Bob Denard. Elle agit ici ou là en faveur des étudiants comoriens notamment à travers son association dont le but est de rapprocher tous les étudiants comoriens à travers le monde entier. Elle collabore avec différentes associations comoriennes de France qui œuvrent pour le développement des Comores dont l'association AJDM de Mandza. Elle a servi d'intermédiaire à plusieurs reprises entre des grandes instances comoriennes et des structures nationales françaises dans le cadre de négociations diverses et variées. Et puis, arme redoutable, elle est populaire auprès des Comoriens de la diaspora, qui la juge très accessible et proche du peuple. Comment peut-on mettre en sourdine le dossier de cette ambassadrice mécène et bienfaitrice ? Autant dire que cette fois-ci, le gouvernement Azali est seul maître de son destin et a l'occasion de choisir entre la pluie et le beau temps.
Omar MIRALI
COMORESplus