LES NON DITSLES NON DITS

Pourquoi autant d’arguties, de stratagèmes pour un secret de polichinelle, un objectif simple ? C’est la question qui taraude l’esprit en observant le microcosme politique du pays et les débats de tranchés sur les réseaux sociaux au sujet de la coalition CRC-Juwa en général et du rapport entre le Ministre de la Justice et « L’Homme » en particulier.

On aurait cru que l’alliance des candidats Azali Assoumani et Fahmi Said Ibrahim, aux présidentielles, l’implication sans réserve de Sambi pendant la campagne, puis l’accord de gouvernement entre la CRC et Juwa, aussi inattendus et circonstanciels, face à une coalition des candidats défaits, apporteraient une stabilité et une cohésion au gouvernement Azali, ne serait-ce que le temps de réaliser quelques gros chantiers. L’exercice du pouvoir laisse apparaître au mieux, une cohabitation au sein du gouvernement, au pire, diront certains, une provocation permanente de nature à rompre les liens, que les deux camps n’osent franchir.

Inutile de s’attarder sur le grotesque rejet de la loi de Finances. Plus significatives, les interférences dénoncées de l’Union pour affaiblir le gouverneur Salami. Sa virulente sortie sur les ondes contre le Ministre de l’intérieur témoigne de la relation tendue entre les deux exécutifs. L’instruction, puis la déchéance du député d’Anjouan, accusé de « falsification » d’identité, sans pourvoir à son remplacement, dans le délai légal contribue à attiser les suspicions de déstabilisation de Dar Nadjah, eu égard à la configuration au sein du conseil de l’île : parité entre le pouvoir et l’opposition. D’autant qu’il se murmure que des émissaires de Befuni tentent par tous les moyens de débaucher des éléments de leur allié du moment. L’objectif serait une large coalition pour le grand rendez-vous du quinquennat ; à savoir la révision constitutionnelle. Un projet confié à l’homme de confiance du président, le vice-président de l’Assemblée de l’Union.

Au sein du gouvernement, le rôle « prépondérant et intrusif », occupé par le Secrétaire général du Gouvernement gripperait la machine entre la présidence et le Ministère de la Justice. « L’Homme » est soupçonné d’une volonté d’obstructions des différentes initiatives de réformes proposées par ce ministère. Différents textes envoyés pour présentation en conseil des ministres auraient pris de la poussière au secrétariat. Pourtant, certains correspondaient bien au plan d’actions du gouvernement, (Conseil Supérieur de la Magistrature, Haute Autorité de la Fonction Publique, Tribunal de Commerce, loi portant création du juge de l’exécution des jugements civils et commerciaux…) à un moment où des conseils n’ont pas eu lieu faute de projets soumis. Parmi les autres griefs, le retard pris dans la présentation de projets de loi à la session précédente, (loi sur la nationalité par exemple) alors qu’ils étaient validés en conseil des ministres. La volonté d’agir à sa discrétion s’élargirait aux ordres de mission. Le plus frappant serait le cas de la direction du Hadj. Tout le monde a en mémoire la réussite du hadj 2016. Il se trouve que le ministère et le directeur auraient élaboré son plan d’action, depuis la nomination de ce dernier. Deux demandes de missions pour finaliser les conventions auraient été déposées par le ministre de la justice depuis octobre et novembre dernier mais ajournées sine die sans explication. Jusqu’à ce que dernièrement, le porte-parole du gouvernement déclare dans la presse qu’ « il est recommandé à la direction du Hadj de présenter un plan d’urgence ». Le comble de l’ironie dans cette relation « ambiguë », c’est le rôle de juge et partie dans l’attribution de notes aux ministères.

Victimisation ou complot, toujours est-il qu’avec la persistance de la rumeur d’un remaniement annoncé, avec une opposition avocate de l’émergence plus que l’imam, le Ministre de la justice est aujourd’hui plus qu’avant soumis aux feux de la critique et ses moindres faits et gestes scrutés à la loupe.

On peut comprendre le besoin salvateur d’un Etat de droit, d’une justice équitable et respectueuse des droits de chaque citoyen. C’est le vœu de chaque citoyen. Mais on a le droit de s’interroger sur les silences, les oublis volontaires dans le discours de certains à l’instar de notre ambassadrice, Daika HAMADI, qui se réveillent chantre d’une justice irréprochable.

Passons sur la reconnaissance d’un acte humanitaire louable. Passons sur une certaine méconnaissance manifeste des procédures et des décisions judiciaires prononcées. Mais, quatre voyages officiels du ministres d’Etat, comparés à ceux des autres, y compris le président, l’expropriation injustifiée à Anjouan, au mépris de la loi, l’arrêté illégal du préfet de Ntsoudjini, le refus du ministre de l’intérieur de se conformer à la décision de la cour d’appel qui ordonna la restitution du matériels appartenant à la station La Baraka FM, les nombreux marchés sans appel d’offre (moteurs MAMWE, Comores Télécom, les hydrocarbures …), l’envoi de soldats au front sans explication aucune constituent-ils vraiment un palier vers l’émergence tant chantée ? Mais dans ce contexte, la sortie de l’ambassadrice DAIKA est-elle dénuée de toute arrière-pensée et manipulation politique ?

L’équité exige l’impartialité. Quand la critique est volontairement orientée, elle ne peut qu’être contreproductive. Le pays exige de la part de ses citoyens, un peu d’honnêteté.

Laïla Said OMAR

COMORESplus

 

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