Mayotte dévastée par le cyclone Chido : un cri d’alarme pour une île oubliée
18 déc. 2024Mayotte dévastée par le cyclone Chido : un cri d’alarme pour une île oubliée
/image%2F1385848%2F20241218%2Fob_b6b197_c392f047-e355-4217-aefb-998e84e2fe01.jpeg)
Il y a quelques jours, l’archipel des Comores, et plus particulièrement l’île de Mayotte, a été durement frappé par un événement climatique dévastateur. Le samedi 14 décembre, le cyclone Chido s’est abattu avec une violence inouïe sur Mayotte, laissant derrière lui un paysage de désolation. Les Comores, situées dans l’océan Indien, sont régulièrement confrontées à des phénomènes climatiques extrêmes, comme le cyclone Kenneth, qui avait causé des dégâts considérables en 2019. Cette fois, cependant, Mayotte a été l’île la plus touchée.
Les Comores ont bénéficié de la protection naturelle offerte par la côte est du continent africain et, dans une moindre mesure, par la côte ouest de Madagascar. Mais Mayotte, en raison de sa position géographique particulière, demeure extrêmement vulnérable. Située dans l’hémisphère sud, entre l’équateur et le tropique du Capricorne, à l’entrée du canal du Mozambique, Mayotte est directement exposée aux vents violents venant de l’océan Indien. Si les cyclones affectent souvent Madagascar, ils frappent rarement de plein fouet l’archipel des Comores. Généralement, les îles comoriennes ressentent les effets atténués des vents et des déflagrations, mais dès qu’un cyclone décline et se rapproche de la pointe nord de Madagascar, Mayotte devient la première cible en raison de sa position d’île la plus orientale et la plus exposée de l’archipel.
Le cyclone Chido, qui a récemment frappé, a littéralement ravagé Mayotte. L’île est méconnaissable, réduite à un paysage de ruines. Des arbres ont été déracinés, des toitures arrachées, des biens précieux détruits ou endommagés par l’eau, et des bateaux ont sombré. Le bilan humain est particulièrement tragique : on dénombre, pour l’instant, 22 morts et près de 250 blessés. Les dégâts matériels sont colossaux, et l’île est plongée dans une crise humanitaire et environnementale sans précédent.
Mayotte, qui compte officiellement environ 320 000 habitants, accueille également une population significative venue des autres îles des Comores, estimée entre 100 000 et 200 000 personnes. Ces derniers, souvent considérés comme des migrants illégaux, vivent pourtant sur leur propre territoire, car Mayotte reste une île comorienne sous administration française. Ce drame met en lumière non seulement les défis climatiques auxquels Mayotte est exposée, mais aussi la complexité politique et sociale qui entoure l’île et son appartenance à l’archipel des Comores.
La situation actuelle exige une attention particulière de la communauté internationale, non seulement pour soutenir Mayotte dans la gestion de cette crise, mais également pour réfléchir aux enjeux environnementaux et géopolitiques auxquels l’archipel des Comores est confronté.
Il est temps de mettre de côté les considérations géopolitiques, de dépasser les querelles politiques et les divergences d’idées. Face à un peuple sinistré, l’heure est à l’humanisme. Le différend franco-comorien concernant Mayotte n’est pas la priorité du moment. Devant l’ampleur des dégâts laissés par le cyclone Chido, il devient impératif d’apporter un soutien massif et une solidarité sans faille.
Bien que Mayotte soit considérée comme un département français, il s’agit d’un territoire largement délaissé. La France y exerce une souveraineté jugée illégale au regard du droit international, et pourtant, malgré cette emprise, Mayotte demeure le département français le plus pauvre. Aujourd’hui, la réponse de l’État français à la catastrophe reste insuffisante, voire inexistante, ce qui renforce les critiques souvent formulées par les Comoriens et les Mahorais lucides sur la réalité politique. Cette situation reflète une vérité difficile à ignorer : Mayotte, bien que sous administration française, ne bénéficie pas de l’attention et des moyens nécessaires pour assurer des conditions de vie dignes à ses habitants.
Avant même le passage du cyclone, les conditions de vie à Mayotte étaient désastreuses. La vie y est excessivement chère, les infrastructures administratives sont inadéquates et le soutien de l’État français s’avère minimal, voire inexistant. Cette réalité alimente un sentiment d’abandon parmi les Mahorais, qui se sentent marginalisés. La France, qui dispose de ressources considérables grâce à son influence en Afrique, aurait les moyens d’améliorer considérablement la situation à Mayotte, mais choisit de diriger ses priorités ailleurs. Elle investit dans des crises internationales, comme en Ukraine, lorsqu’il s’agit de défendre ses intérêts géopolitiques, mais reste silencieuse face aux besoins urgents des Mahorais. Cette inaction démontre clairement que les Mahorais ne sont ni considérés comme des Français à part entière ni traités comme tels.
Quant aux Comores, bien qu’elles partagent une histoire, une culture et une appartenance commune avec Mayotte, le gouvernement de Moroni ne dispose pas des moyens nécessaires pour intervenir de manière significative. Les trois autres îles de l’archipel luttent elles-mêmes pour leur propre développement, et de nombreux Comoriens quittent ces îles pour Mayotte dans l’espoir de trouver de meilleures conditions de vie. Toutefois, cela ne signifie pas que les Comores restent indifférentes. La solidarité comorienne s’est manifestée massivement, les querelles politiques ayant été mises de côté pour venir en aide à l’île sœur de Mayotte.
Face à cette situation, la communauté internationale est appelée à jouer un rôle crucial. Elle ne peut ignorer la détresse des Mahorais, laissés à eux-mêmes. Chaque geste compte, et chaque main tendue est nécessaire pour soulager la souffrance de cette population. L’urgence humanitaire dépasse les différends politiques et exige une mobilisation collective, guidée par un impératif d’humanité.
Mayotte est aujourd’hui en détresse et a besoin d’une aide urgente. Une grande partie de la population vivait déjà dans des conditions précaires, notamment dans des bidonvilles composés de maisons en tôle, incapables de résister aux intempéries. Pourtant, l’océan Indien est régulièrement frappé par des cyclones, et ces catastrophes naturelles sont devenues une réalité récurrente pour cette région.
N’est-il pas temps de réfléchir à des solutions durables pour protéger la population mahoraise ? La construction de logements anticycloniques adaptés aux spécificités climatiques de la région est une nécessité urgente. De même, il est impératif d’investir dans des infrastructures sanitaires, comme des hôpitaux équipés, pour garantir une prise en charge rapide et efficace des blessés. Ces mesures, bien que fondamentales, ne sont qu’une partie des efforts nécessaires pour améliorer durablement les conditions de vie des Mahorais.
Nous en appelons à la communauté internationale, en particulier à l’Organisation des Nations unies et aux organisations humanitaires, afin qu’elles prêtent une attention sérieuse à la situation dramatique que traverse Mayotte. La population comorienne, dans son ensemble, fait tout ce qui est en son pouvoir pour apporter son aide, malgré ses propres difficultés socio-économiques. Les Comores et Mayotte partagent une histoire commune, des valeurs similaires, une culture identique, et les mêmes réalités économiques. Nous sommes un même peuple, uni dans la douleur et la solidarité, malgré des frontières administratives imposées.
La pauvreté qui touche l’ensemble de l’archipel rend les défis encore plus complexes. Pourtant, cette solidarité naturelle entre les îles comoriennes doit être renforcée par une mobilisation internationale. Il est temps d’agir, non seulement pour répondre à l’urgence humanitaire actuelle, mais aussi pour œuvrer à la reconstruction de Mayotte sur des bases solides et durables. C’est une responsabilité morale, politique et humaine que nous devons tous partager. C’est une urgence d’autant plus cruciale pour les Comores, car Mayotte est et restera à jamais comorienne.
HOUDAIDJY SAID ALI
Juriste Publiciste et Internationaliste
Paris- France