Un bouleversement des relations diplomatiques comoriennes au cœur de la crise à Mayotte

La situation tragique à Mayotte pourrait profondément influencer les relations internationales, notamment en raison du différend entre l’Union des Comores et la France concernant ce territoire. La France, en maintenant sa souveraineté sur l’île, refuse de se conformer aux résolutions des Nations unies, lesquelles réaffirment le droit des Comores sur Mayotte.

Cependant, au-delà des enjeux politiques et juridiques, la réalité sur le terrain est accablante. Mayotte traverse une période de dévastation avancée : destructions, pertes humaines et souffrances généralisées. Cette situation a poussé la population comorienne, malgré ses propres conditions de vie précaires, à se mobiliser pour soutenir ses habitants. Des appels à l’aide ont été lancés et des collectes de fonds largement diffusées sur les réseaux sociaux témoignent d’un élan de solidarité sans précédent envers leur “île sœur”.

Cette tragédie nous invite à réfléchir collectivement, dans un esprit de responsabilité et de fraternité. Elle constitue une opportunité pour les parties concernées d’ouvrir un dialogue sincère et constructif, tout en plaçant l’humanité au cœur des priorités. Mayotte appelle aujourd’hui à la solidarité et à une réponse juste, tant sur le plan humanitaire que diplomatique.

Entre souveraineté et humanité, quel sera le rôle de l’État comorien face à cette situation alarmante ?

L’article soulève des questions cruciales, susceptibles de devenir encore plus préoccupantes dans un avenir proche. La première concerne le sort des citoyens comoriens issus des trois autres îles de l’Union des Comores présents à Mayotte, que la France considère comme des migrants en situation irrégulière. Face à cette réalité, une question essentielle se pose : quelles seront les mesures prises par le gouvernement français et les autorités locales ? Apporteront-ils une aide humanitaire à ces personnes en détresse ou choisiront-ils une politique d’expulsion, aggravant ainsi leur situation ?

Cette politique d’expulsion a déjà suscité la désapprobation du gouvernement de l’Union des Comores, sous la présidence de Son Excellence Azali Assoumani. Ce dernier a refusé de recevoir des compatriotes que la France souhaitait expulser vers l’île d’Anjouan, arguant que ces citoyens se trouvaient sur leur propre territoire national. Ce refus repose sur un principe fondamental : la souveraineté des Comores sur l’ensemble de son territoire, y compris Mayotte.

L’attitude de la France vis-à-vis des populations comoriennes à Mayotte, marquée par une distinction flagrante entre Mahorais et Comoriens des autres îles, soulève des interrogations profondes. La France prendra-t-elle en charge les blessés et les nécessiteux qu’elle considère comme des migrants illégaux ? Cette question, lourde de conséquences humanitaires et diplomatiques, doit figurer parmi les priorités du gouvernement comorien.

Le cas de Mayotte constitue une tragédie humaine et politique qui exige la mobilisation de toutes les parties concernées. Si l’aide internationale est nécessaire, il est impératif que l’Union des Comores joue un rôle de premier plan dans cette crise, affirmant sa souveraineté sur son territoire. Cela requiert non seulement des actions concrètes, mais aussi une coopération diplomatique marquée par le respect mutuel et une responsabilité partagée.

Il est utile de rappeler certains faits concernant la situation de Mayotte. Avant les événements récents, les conditions de vie y étaient déjà précaires. Il a été observé que l’intérêt du gouvernement français pour Mayotte réside davantage dans sa position géostratégique dans l’océan Indien que dans le développement réel de l’île. Les Comoriens des autres îles ont souvent averti les Mahorais des illusions liées à leur appartenance à la France, soulignant que les lois françaises ne s’appliquent pas de manière équitable à Mayotte et que l’île subit un traitement différent de celui des autres territoires français.

Malgré des revendications anciennes pour des infrastructures essentielles, telles que l’accès à l’eau potable et des conditions de vie dignes, la réponse du gouvernement français a souvent été insuffisante. La visite récente du président Emmanuel Macron à Mayotte semble davantage motivée par des impératifs politiques que par une volonté réelle de résoudre ces problèmes structurels, ce qui donne l’impression de mesures purement symboliques ou superficielles.

Sur le plan diplomatique, l’Union  des Comores a régulièrement porté la question de Mayotte devant les Nations Unies et dans le cadre de ses relations avec la France. Cependant, cette revendication nécessite une stratégie plus résolue. L’exemple de la République de Maurice, qui a obtenu gain de cause face à la Grande-Bretagne concernant l’archipel des Chagos, montre qu’un engagement déterminé peut aboutir à des résultats concrets, même face à des puissances établies.

La France, quant à elle, ne mettra pas fin à son occupation illégale sans une pression diplomatique ou juridique cohérente et soutenue. Ce contexte exige une mobilisation accrue des autorités comoriennes pour faire valoir leurs droits légitimes et poursuivre cette lutte sur la scène internationale.

Le Maroc tourne le dos aux Comores, l’Algérie et le Burkina Faso restent fidèles à la justice

La question de Mayotte demeure une problématique sensible, susceptible de perturber les relations amicales entre les nations. Il est crucial d’aborder cette situation avec retenue et un profond respect des principes du droit international.

Face à la tragédie provoquée par le passage du cyclone, certains États ont manifesté leur solidarité envers le peuple comorien. L’Ambassade du Burkina Faso à Addis-Abeba a exprimé ses condoléances à l’Ambassade de l’Union des Comores, témoignant ainsi de son soutien aux victimes. Ce geste reflète la reconnaissance de la souveraineté des Comores sur Mayotte, illustrant les valeurs de justice et d’intégrité propres au Burkina Faso. Dans une note officielle datée du 18 décembre 2024, ce pays a honoré son engagement pour la vérité.

De son côté, l’Algérie a également pris une position marquée. L’Ambassadrice Selma Malika Hadadi a présenté ses condoléances au gouvernement comorien, évoquant les dégâts subis par les Comores, y compris à Moroni. Par ce geste, consigné dans une note du 19 décembre 2024, l’Algérie a témoigné de son soutien envers les Comores, confirmant implicitement son alignement sur la justice en reconnaissant leur souveraineté sur Mayotte.

Ces démarches montrent la capacité des États à rester fidèles à des principes de vérité et d’équité tout en apportant un soutien concret aux peuples affectés.

Le Maroc, de son côté, a adressé ses condoléances à la France, ce qui a surpris le peuple comorien. Historiquement, les Comores et le Maroc ont entretenu des relations excellentes, liées par la culture arabe et musulmane et une histoire commune de colonisation. Toutefois, le Maroc, qui revendique la marocanité du Sahara, semble avoir privilégié ses relations avec la France, en raison de la reconnaissance de cette marocanité. Ce choix a déçu les Comoriens, qui espéraient un soutien de leur frère d’armes sur la scène internationale.

Dans un discours récent, l’ancien ministre Maître Fahmi Said Ibrahim a rappelé l’engagement du Roi Mohammed VI pour la défense de la question sahraouie. Toutefois, dans les relations internationales, les intérêts priment souvent sur les principes, ce qui reste regrettable. En adressant ses condoléances à la France, le Maroc a, par implication, reconnu la souveraineté de la France sur Mayotte, au détriment de celle des Comores.

Cette situation interpelle et mérite une réflexion sur l’équilibre entre intérêts et principes dans les relations internationales.

La diplomatie proactive et le soutien africain : Une démarche décisive sur la question de Mayotte

Les Comores doivent adopter une diplomatie proactive, à l’image des efforts déployés ces dernières années par le président Azali. Celui-ci a su s’entourer de chefs d’État influents, augmentant ainsi la stature diplomatique du pays. L’invitation de leaders africains à sa cérémonie d’investiture est un exemple marquant de cette approche.

Les Comores entretiennent des relations solides avec le Sénégal et devraient capitaliser sur ces liens, notamment avec les pays du Sahel, pour renforcer cette coopération. De plus, en ayant présidé l’Union africaine, le président Azali bénéficie du soutien de plus de cinquante États africains. Dans ce contexte, il est certain que les Comores ont les moyens de gérer la situation de Mayotte, malgré les tensions.

L’aide humanitaire destinée à Mayotte doit devenir une priorité absolue. Le ministère des Affaires étrangères et les institutions comoriennes compétentes doivent agir rapidement et efficacement. L’inaction de Moroni risquerait de laisser Mayotte sous la tutelle française de manière injustifiée. Il est essentiel de rappeler que Mayotte fait pleinement partie des Comores et que les Mahorais, tout comme les habitants des autres îles, sont des Comoriens à part entière.

L’État comorien doit s’appuyer sur ses partenaires internationaux pour obtenir l’aide nécessaire. Cette coopération, venant de pays amis, serait la solution la plus efficace, compte tenu des ressources limitées dont dispose actuellement le gouvernement de Moroni pour gérer ce dossier sensible.

HOUDAIDJY SAID ALI

Juriste Publiciste et Internationaliste

Paris – France

COMORESplus

 

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