Comores : rien ne facilite l’entrée à Mayotte (2ème partie)

  

 

A peine  décollé de Hahaya, un mouchoir et  un verre  d’eau de rafraichissement servis par les hôtesses, les hauts parleurs  du Boeing 707 de l’air Austral annoncent : « Mesdames et messieurs nous commençons notre descente à Dzaoudzi… ». Les femmes mettent leur dernière touche de beauté et l’atterrissage se déroule sur un tarmac de Pamandzi  inondé de pluie persistante. Un bus bien entretenu  nous ramène vers le couloir de l’arrivée. Des ‘’Mbiwu ‘’ cadençaient notre accueil, comme parmi nous se trouvaient des personnes venues pour des cérémonies de mariage.

 

Le barrage de la PAF Mayotte tenu par deux policiers de couleurs différentes  s’interpose entre  l’accueil  bagages, la douane et l’arrivée. Sans me presser j’ai suivi la file et choisi celle  de l’agent de police qui me ressemble.   J’ai remis à travers la petite fente sous  la baie vitrée, mon passeport  et mon billet d’avion. Quelques instants après, une série de questions  me parvenait de l’autre côté. « Attestation d’hébergement, assurance, réservation d’hôtel, chèque de voyage, argent de poche… ? »  Stupéfait et amusé en même temps, je lui répondais : ‘’En vrai, je n’ai pas demandé de visa pour Mayotte, j’ai  juste coché une case d’un formulaire et ces documents je les ai remis  une seule fois pour la demande du visa Schengen il y a longtemps de cela. Je n’ai rien d’autres que ce qu’il y a sur ce passeport’’. L’agent consulte son collègue d’uniforme et me demande de me ranger  sur le bas côté, attendre et laisser évoluer la file de passagers. Intercalé au milieu entre les agents de l’aéroport et   les passagers, ceux-ci se posent les questions  d’usitées : «  c’est encore un de ces  malins clandestins. On va sûrement le renvoyer par  le prochain vol. Ils sont toujours  audacieux ces  Comoriens.  Ils sont forts en tout cas en falsification de papiers. Mais celui-ci  ne ressemble  pas  à un clando…»  Comme un piquet pour une longue attente, j’ai pu constater avec humeur que  nous sommes sérieusement  envahis. De mon gardez-vous de fortune, j’aperçois impuissant et amer, des étrangers de couleur et de langue différentes des nôtres, avec des documents de voyage étrangers, entrer chez nous  facilement comme dans un moulin à vent;  alors que les gens comme moi  passent de longues minutes de questionnement et d’observations  avant d’être refusés ou autorisés à rentrer chez eux.

 

Le contrôle des passagers ayant  pris fin, l’agent de police m’invite à le suivre.  En attendant de récupérer mon bagage pour ensuite  m’amener au  CILEC où sont enfermés les clandestins en attente de reconduite, je relance  une discussion. Ils essaient de me faire accepter que je devrais avoir une liasse de paperasse pour entrer à Mayotte  et à moi de leur intimer le fait que même avec le visa Schengen, j’ai visité l’Europe et la France plusieurs fois  l’année et jamais on ne m’a rien demandé de plus que ce qu’il y a dans mon  passeport comorien. Je constate que lassés par l’attente ils peinent à vouloir trouver une raison pour finir cette  histoire, comme je commence à les embarrasser et que ma valise comme celles de tous les passagers d’ailleurs n’arrive toujours pas. La liasse de papier va jusqu’à se réduire à une seule : l’assurance. ‘’Je n’ai pas besoin d’assurance puisque je vais chez la famille et des amis et j’ai ma mutuelle de santé que voici’’. Et sur cette réponse, l’Agent Djoumoi  fondait son autorisation pour me permettre de rentrer chez nous à Mayotte. Mon passeport et mon billet de retour me sont remis  avec un geste  de bienvenu.  « Vous avez commis une forfaiture leur disais-je ;  j’imagine les supplices que subissent les autres  passagers vulnérables, quand je vois ce que vous m’avez fait  endurer.  C’est pourquoi à mon tour je vous demande vos noms  et vos grades car  cette affaire ne sera ni pierre ni arbre ».

                                           

Saïd MZE DAFINE

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