Ali Soilihi, le révolutionnaire comorien est mort le 29 mai 1978, sous les balles des mercenaires, sous les ordres des hommes de la Restauration comorienne, à la tête de laquelle se trouvait Ahmed Abdallah dont Ali Soilihi avait préservé la vie en 1975, puis avait remis un passeport diplomatique pour qu'il aille défendre les intérêts de son pays à l'extérieur.

Du 13 mai au 29 mai 1978, les nouveaux maîtres des Comores avaient eu le temps de réfléchir et de prendre une décision sur le sort d'Ali Soilihi. Ils ont décidé et Bob Denard a exécuté. Comme chaque année, les partisans du Mongozi prieront en mettant en avant les réalisations et l'esprit d'indépendance du régime, alors que les opposants mettront en avant les exactions que leurs parents ou proches ont subi.

Comme chaque année aussi, on assistera à la déformation de l'histoire de la part de certains professionnels de la complotite (qui voient des complots partout). Et on lit depuis quelques jours sur le net des montages dignes des régimes les plus autoritaires. On invente et on met entre guillemets des dialogues qui n'ont jamais existé, on nous présente des rencontres qui n'ont jamais eu lieu et des actes qui n'ont jamais été commis et qu'aucun historien n'a évoqué un jour. On répète des lieux communs qui n'ont pas de sens : Ali Soilihi a fait le premier coup d'Etat avec l'aide de Bob Denard, Ali Soilihi a servi les intérêts de la France, le coup d'État de 1975 est la cause du départ de Mayotte... et blablabla.... Quand la rumeur devient histoire, les historiens préfèrent s'éloigner. Comme s'il fallait laver de tout soupçon des proches en accusant le Mongozi de tout le mal du régime, comme si le cadavre d'Ali Soilihi continuait à faire peur à certains qu'il faille lui remettre quelques coups aux côtes et vérifier qu'il est bien mort et qu'il viendra pas nous faire peur encore. Ali Soilihi devient donc pour ceux-là, celui qu'on appelait dans l'Antiquité grec le "pharmakos", c'est-à-dire celui qu'on exécute par lapidation afin de laver le mal de toute une cité. Dépêchons-nous de dire qu'Ali Soilihi a fait un coup d'État tout seul, cela nous évitera d'examiner profondément qu'à la tête de ce coup, il y avait des gens qui à l'époque étaient plus important qu'Ali Soilihi. Dépêchons-nous de dire qu'Ali Soilihi donnait les ordres pour punir certains notables jusque dans les villages les plus reculés de Ngazidja, Mwali et Ndzuani, sinon, il faudrait se demander s'il n'y avait pas un Ministre de l'Intérieur et des préfets. Heureusement le peuple ne se trompe pas, qui au regard des crimes commis par les hommes de la Restauration par mercenaires interposés, comprend mieux aujourd'hui les intentions d'Ali Soilihi, au-delà des dérives du régime.

Mahmoud Ibrahime

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